Une université américaine propose un cours : « Perdre son temps sur Internet »

Chaque mercredi du prochain semestre, des étudiants de la réputée université de Pennsylvanie devront, lors d’un cours de trois heures, surfer sans but précis sur le World Wide Web, avec le soutien actif de leur professeur, Kenneth Goldsmith.

Ce critique américain et poète reconnu, qui fonda en 1996 le site UbuWeb, est l’initiateur de ce nouveau module du département de littérature, baptisé « Perdre son temps sur Internet », complémentaire d’un atelier d’écriture. « Je suis très fatigué de lire chaque semaine dans le New York Times des articles qui nous font culpabiliser de passer tant de temps sur Internet, et de nous disperser. Il est complètement faux de dire qu’Internet nous rend plus bêtes. Je pense qu’il nous rend plus intelligents », explique-t-il au site d’information Vice.

DEBORD ET QUENEAU POUR INSPIRATEURS

Alors que les écrivains du XXe siècle ont dépensé infiniment d’énergie et de temps à faire émerger leur subconscient, terreau du surréalisme, divaguer sur Internet est le moyen idéal de se rapprocher de cet état de flottement propice à la création, explique Kenneth Goldsmith : il s’agira grâce à ce cours « d’arracher un objet artistique de cet état de distraction créé par le fait de parler au téléphone tout en surfant sur le Web, ou de regarder une vidéo tout en discutant ».

Le matériau glané en ligne permettra de faire œuvre de littérature. « Pourrions-nous reconstruire notre autobiographie en utilisant seulement Facebook ? Pourrions-nous écrire un bon roman en pillant notre fil Twitter ? », interroge la présentation du cours sur le site de l’université.

Afin d’encourager ses étudiants dans cette voie peu commune, le poète et enseignant leur proposera d’explorer la longue histoire de la récupération de l’ennui et de la perte de temps, avec, entre autres fameux auteurs, les Français Guy Debord, penseur du situationnisme, et Raymond Queneau, fondateur de l’Ouvroir de littérature potentielle. De quoi rassurer tout étudiant inquiet du temps passé à procrastiner sur le Net.

Source: Le Monde