Par La Rando

La crise syrienne et le Qatar

La crise syrienne s’enlise. Après plus de dix-huit mois de révolte et alors que les exactions se multiplient, le régime ne s’est pas effondré et semble, malgré de sérieux revers, être en mesure de se maintenir pour un moment. Caisse de résonance d’un conflit qui prend une dimension régionale, le théâtre syrien voit s’affronter un régime à bout de souffle soutenu par l’Iran, la Russie et la Chine et une population dont la contestation a progressivement pris, après des mois de protestation pacifique, une tournure militaire. Dans le chaos qui règne aujourd’hui, le rôle de certaines « pétromonarchies », particulièrement du Qatar, interroge et inquiète certains observateurs. Il nous paraît donc opportun de mettre ici en évidence les contours de la stratégie qatarie dans une crise qui révèle les lignes de faille d’un Moyen-Orient où l’enjeu confessionnel devient malheureusement dominant.

L’intransigeance du régime syrien

Il faut d’abord revenir aux fondamentaux du conflit. Portée par le vent de liberté qui a balayé les régimes de Ben Ali et Moubarak, la révolte est née d’une volonté populaire de se libérer d’une dictature militaire qui étouffait la vie du citoyen syrien.
D’abord pacifique, le mouvement de protestation a été contraint à la militarisation du fait d’une répression aveugle dénoncée par plusieurs organisations de défense des droits humains.
Comme le souligne le journaliste Alain Gresh :
« Par son refus de s’engager dans des réformes sérieuses et un dialogue avec l’opposition, par son usage indiscriminé de la violence contre des manifestations qui, pour l’essentiel, restaient pacifiques, par un usage généralisé de la torture, il [Bachar el-Assad] a contribué à la montée de la violence, au passage d’une partie de l’opposition à la lutte armée ; il a, d’un même mouvement, favorisé les ingérences qu’il prétendait vouloir combattre. »
Tout porte à croire que c’est donc l’intransigeance du régime qui est la cause première de la régionalisation du conflit et de l’ingérence de puissances extérieures.
 
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Par La Rando

L'intervention du Qatar en Libye

Le petit émirat du Golfe fait encore parler de lui. Sa chaîne Al Jazeera, l’organisation de la Coupe du monde de foot… et aujourd’hui, pays arabe en pointe au sein de la coalition qui bombarde les forces pro-Kadhafi. Quatre avions qataris devraient en effet se joindre à l’opération « Aube de l’Odyssée ».
Cette information, confirmée dimanche après-midi par la chaîne Al Jazeera, est d’une importance capitale pour les Occidentaux car une participation militaire des forces qataries prouvera le caractère pluriel de la coalition. Elle permettra aussi de désamorcer les critiques qui font de ces frappes une nouvelle guerre de l’Occident contre le monde musulman, rhétorique abondamment utilisée par le dictateur libyen.
Trois observations peuvent être retenues pour expliquer les ressorts de cette diplomatie qatarie qui se démarque de celle des autres pays arabes.

Une diplomatie d’ouverture pour exister

Les élites dirigeantes du Qatar ont toujours voulu compenser les faiblesses structurelles du pays (taille réduite, population minime, vulnérabilité stratégique) par une diplomatie active et d’ouverture. Cette stratégie a permis d’ériger le pays en élément central de l’équation stratégique au Moyen-Orient.
Ces dernières années, l’émirat est donc devenu un acteur incontournable de la résolution des conflits régionaux (ce qui fut notamment le cas pour les crises au Soudan et au Liban). La participation à la coalition entre dans le cadre de cette manœuvre qui érige le pays en poids lourd du monde arabe.
De plus, le Qatar entretient d’excellentes relations avec les Etats-Unis et la France, notamment dans le domaine militaire. L’émirat abrite le Centcom (commandement central américain qui a piloté les guerres d’Irak et d’Afghanistan) et 80% du matériel et équipement de l’armée qatarie sont d’origine française.
Dans une opération comme celle-ci où Paris avait impérativement besoin de la caution d’une nation arabe, le choix du Qatar, « partenaire stratégique historique de la France » selon les mots du porte-parole du ministère de la Défense, était donc naturel.