Randonnée Maroc : Les Aït Bougmez

Aujourd’hui, nous prenons notre bâton de pèlerin pour 5 jours de randonnées en étoile dans la vallée des Aït Bougmez. Récit d’un voyage inoubliable et la preuve que oui : le bonheur est bien dans le pré dans la vallée des Aït Bougmez !


RANDONNÉE DU CÔTÉ D’AÏT IMI
Pour une immersion dans la vie de la vallée des Aït Bougmez, une seule prescription : la randonnée à travers champs sur les pas des Berbères qui tous les jours s’affairent dans leurs lopins de terre égrainés le long des 27 villages de la vallée.

C’est au rythme du pas des mules que nous nous engageons sur les sentiers de la Berbérie profonde qui oscillent à travers les parcelles cultivées de la vallée. Je suis d’emblée saisie par l’abondance des cultures et le prodigue de l’eau qui s’écoule à travers les canaux d’irrigation appelés séguias. Ici, rien d’essentiel ne manque : de l’eau provenant de la montagne, de l’orge, du maïs, du blé, des arbres fruitiers, des cultures maraîchères, des noyers, des peupliers et des pommiers en abondance. Résultat ? C’est une authentique oasis de montagne qui déploie son terrain fertile sous nos yeux écarquillés.

En suivant à pas lent Youssef et Lhoucine accompagné de Lahcen ( notre équipe muletière de choc !), nous randonnons sereins et attentifs à tout ce qui nous entoure. Nos amies perchés sur leurs mules s’amusent de leur monture mais aussi des troupeaux de moutons et des poules qui gambadent joyeusement dans le village d’Aït Imi. Deux surprises attendent nos aventuriers en herbe : 1/ Un pique-nique champêtre sous les noyers orchestré par Lhoucine et Mhamed 2/ Une rencontre insolite avec des traces de dinosaures datant du Jurassique inférieur (185 millions d’années). Pour explorer le Wall of Fame de ces bipèdes fantastiques à trois doigts, nous continuons la randonnée jusqu’au village d’Ibakaliwin qui présente une belle architecture en pisé.

Le village de Tabant marque la fin de cette journée randonnée. C’est acclamé par les colonies de cigognes du vieil hameau de Tabant que nous rejoignons notre auberge, lotie à l’entrée du chef-lieu de la vallée. Ici nous attend le spectacle de la vallée embrasée par les douces tonalités des lumières du soir. On prend vite goût à ces instants suspendus…

RANDONNÉE DU CÔTÉ DE SIDI CHITA
L’exploration des Aït Bougmez nous mène aujourd’hui sur le terrain de trek s’étirant de Tabant à la pyramide de Sidi Chita. La zone correspond à la partie verticale du « Y » formé par la vallée des Aït Bougmez.

Parce qu’on ne s’en lasse pas, les cultures de la vallée continuent d’égrainer leur ruban vert clairsemé de brun. Villageoises et villageois s’affairent dans les champs pendant que les enfants gagnent, guillerets, le chemin de l’école. La vie est faite de ses choses simples qui se suffisent à elles-mêmes : cultiver son lopin de terre, trier les herbes, saluer les passants d’un « Salam aleikoum » ou partager un thé à la menthe… On sent bien que le superflu n’a pas fait d’émules par ici.

Le match se joue entre le vert tendre de la végétation et l’austérité des montagnes. Il se poursuit sur les modestes terrains de foot en terre battue aménagés à l’entrée des douars, là ou broutent les troupeaux de chèvres et de montons, à l’orée des forêts de pins.

Au centre du plateau formé par la vallée, émerge une montagne incongrue coiffée d’un grenier collectif en ruines (ighrem en berbère). C’est la colline de Sidi Chita, que l’on reconnaît à sa forme pyramidale héritée des caprices de la géologie. La façade nord colorée de vert semble narguer les strates rocheuses plissées de la façade sud. À ses pieds, le village d’Idoukalen affiche l’architecture typique des douars de la vallée : bâtisses en pisé, ruelles en terre battue et position à flanc de montagne. Chaque traversée de village nous renvoie dans une nouvelle dimension spatio-temporelle…

Nous longeons les hameaux de Aït Ziri et d’Aguerd n’Ouzrou accompagnés par les rires des enfants qui enjambent les canaux d’irrigation et l’eau de la rivière . En ce début d’automne la vallée éclabousse d’une vie sereine et tranquille. On peine à imaginer la rudesse des hivers qui sévissent

LE MARABOUT DE SIDI MOUSSA
Impossible de louper le marabout ( mausolées ) de Sidi Moussa, perché sur un cône régulier à 2008 mètres d’altitude, au-dessus du village de Timit. Son grenier fortifié de forme circulaire abrite le tombeau d’un saint homme réputé pour ses pouvoirs guérisseurs. On dit que le marabout avait le don de guérir les femmes fertiles et que nombre d’entre elle convergent encore ici dans l’espoir d’une descendance.

Si l’ascension est courte (une demi-heure pour les sportifs / une heure pour les rouillés), la pente, elle, est plutôt raide. On comprend que la grimpée pouvait, du temps où le marabout était un grenier collectif, dissuader les éventuels pilleurs. Chaque famille abritait ici céréales, bijoux, récoltes, effets personnels et safran pour les protéger des invasions des tribus ennemies. L’économie sociale et collaborative existait bien avant l’heure dans la vallée heureuse !

La vue là-haut coupe le souffle bien plus que l’effort de la montée. Même recouvert d’un voile nuageux, nous sommes subjugués par la vue à 360° sur les trois vallées.

Le gardien, affalé de tout son long sur un tapis tressé nous invite à pousser la porte du grenier communautaire moyennant une dette de 10 dirhams par personne (le prix de l’entrée) dont nous nous acquitterons lors d’une deuxième montée au marabout de Sidi Moussa. « Machi moushkil a sa7bi, dkhol » (pas de de problèmes les amis, entrez !).

L’intérieur, sombre et abrité du vent recèle une multitude de pièces et de cases où étaient scellées les denrées et les richesses des familles grâce à un système de serrure en bois. La vue sur le toit parachève la découverte de la vallée des Aït Bougmez d’un joli point d’exclamation. Quel meilleur endroit que la terrasse du marabout de Sidi Moussa pour savourer le bonheur d’être suspendus au-dessus de la vallée heureuse ?

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