En France, l’arbre n’est pas un être vivant

Le naturaliste Georges Feterman déplore le fait que la loi française « ne considère pas l’arbre comme un être vivant, mais comme un objet de propriété ».

Les sociétés humaines auraient-elles pu vivre et se développer sans exploiter la forêt ?

Dans les grandes forêts tropicales et équatoriales, l’exploitation est relativement récente. La menace de leur destruction ne date que de deux ou trois siècles. A l’ouest de l’Europe, les grandes transformations remontent à 10 000 ans. Au lieu de cueillir et de chasser, les hommes de cette époque domestiquent les animaux et défrichent pour planter. Ils se « dénomadisent » et transforment radicalement leur environnement. La grande mutation n’a pas été la révolution industrielle !

Les hommes ont enlevé beaucoup de forêts, mais ont laissé des bois pour ce dont ils avaient besoin : le feu, l’usage domestique, la construction. Puis, des Romains jusqu’au XVe-XVIe siècle, un véritable massacre a lieu. Au point que la forêt française régresse et disparaît presque au Moyen Age. Ce qui l’a sauvée, ce sont les chasses royales et seigneuriales, et les bosquets préservés par les paysans pour leurs usages. Sully, le ministre d’Henri IV, plante beaucoup, et Colbert, le ministre de Louis XIV, replante massivement, essentiellement pour la Marine royale.

Au XVIIIe et surtout au XIXe siècle, on reboise aussi les massifs montagneux. Ainsi que les Landes, qui étaient marécageuses, et qui deviennent sous Napoléon III la plus grande forêt d’Europe.

Le chêne des Hindrés, dans la forêt de Brocéliande, en Ille-et-Vilaine

De nos jours, les arbres, avec leur important réseau racinaire, ne pourraient-ils limiter les conséquences, souvent dramatiques, des débordements des cours d’eau ?

Au XIXe siècle, on a cru que l’homme pouvait tout maîtriser, tout réguler. Alors on a enlevé les aulnes ou les frênes des bords des rivières en en modifiant le tracé. Depuis, on a compris qu’il fallait arrêter… et replanter. Il y a des arbres adaptés au milieu humide. Et l’idéal, c’est de mêler l’agriculture aux plantations boisées : un champ, une rangée d’arbres… selon les principes de l’agroforesterie, une solution agricole raisonnable. On voit ainsi les haies réapparaître, avec des fleurs, des fruits pour les oiseaux, qui vont pouvoir nicher en hiver.

On constate aussi une évolution récente vers une meilleure préservation. Nous avons ainsi conçu le label « Arbre remarquable de France ». Notre idée est que faire connaître un arbre le protège. Dans 99 % des cas, ça marche. En créant un événement autour d’un chêne de 500 ans ou 1 000 ans, on déclenche un réflexe de « gentil chauvinisme », de fierté. L’arbre a traversé le Moyen Age, la Renaissance, la Révolution… Et c’est aussi une porte d’entrée pour parler des forêts ou de l’agriculture.

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